Ah, qu’il était simple de disputer une coupe du monde dans les années trente ! Hormis les questions de transport (quinze jours de bateau entre l’Europe et l’Uruguay, sans nuage de cendres volcaniques), la première édition du trophée Jules-Rimet avait des petits airs de coupe des confédérations. Treize équipes engagées sur invitation, un premier tour avec des groupes de trois (sauf celui de la France, pas de bol), une demi-finale et vous voilà déjà finaliste. C’est comme ça que l’Urugay est devenu le premier vainqueur en ayant disputé en tout et pour tout quatre matches (tous gagnés).
Changement de formule dès la deuxième édition. Il y a désormais 32 équipes participantes, il faut donc en éliminer la moitié pour obtenir une phase finale à seize. Comme en 1938, le tournoi est une vraie coupe du monde, puisque le premier tour de poules est remplacé par des huitièmes de finale. Là aussi, quatre matches suffisent pour être champion du monde, mais au moins ce sont quatre matches couperet. A noter qu’en 1938, la Tchécoslovaquie est directement qualifiée pour les quarts, l’Autriche étant forfait après avoir été annexée par l’Allemagne. Quelques mois après, la Tchécoslovaquie allait subir le même sort...
Après la guerre, virage à 180 degrés avec une coupe du monde qui devient un championnat, dépourvu du moindre match à élimination directe. Même pas de finale ! Treize équipes seulement y participent, avec un premier tour qui ne ressemble à rien (deux groupes de quatre, un de trois et le dernier... de deux !), et un tour final à quatre dont le dernier match, coup de chance, oppose les deux équipes de tête (Brésil et Uruguay). Mais un match nul suffirait aux Brésiliens pour être titrés. Comme il y a une justice, l’Uruguay l’emporte avec seulement quatre matches joués (trois victoires et un nul).
C’est en 1954 qu’une formule stable va enfin voir le jour. Elle sera appliquée jusqu’en 1970 grâce à sa simplicité : seize qualifiés (le nombre d’engagés passe de 38 à 70), un premier tour à quatre poules de quatre, suivi de quarts, demis et finale. C’est un mélange équilibré entre une formule championnat qui garantit à chaque équipe au moins trois matches, et une formule coupe qui laisse — théoriquement — leur chance aux sélections de second rang. Le Brésil va beaucoup aimer cette formule, puisqu’il va remporter trois des six trophées mis en jeu.
Les années soixante-dix mettent un sérieux coup de frein à la glorieuse incertitude du sport. Il y a désormais près de cent pays engagés, la FIFA fait de la compétition un tiroir-caisse et les organisateurs en veulent pour leur argent. Adieu les matches à élimination directe, bonjour le second tour. Quatre groupes de quatre d’abord, puis deux groupes de quatre ensuite, les deux premiers se retrouvant en finale. Comme par hasard, les deux pays organisateurs s’imposent à domicile au terme de compétitions pauvres en émotions.
Une sixième formule voit alors le jours, avec le passage de 16 à 24 qualifiés, histoire de faire plus de place aux sélections africaines, asiatiques et nord-américaines. Les demi-finales sont également rétablies, mais pour passer de douze qualifiés (six poules de quatre) à quatre, la FIFA concocte un second tour avec quatre poules de trois. Bizarrement agencée (les matches du second tour ne se jouent pas simultanément), cette variante sera sans lendemain.
De 1986 à 1994, on rétablit donc les huitièmes et les quarts de finale, mais comme il y a toujours 24 qualifiés (alors que le nombre de pays engagés grimpe encore de 109 à 144), une règle étrange est adoptée : les deux premiers de chaque poule sont accompagnés par les quatre meilleurs troisièmes. Autrement dit, il faut 36 matches pour éliminer huit équipes !
Le passage de huit à seize équipes à l’Euro (à partir de 1996) pousse la FIFA à la surenchère : à partir de 1998, la phase finale de la coupe du monde accueille désormais 32 sélections. Une décision justifiée par le nombre croissant d’engagés (qui atteint 203 pour 2010) et surtout par une formule qui retombe sur ses pattes : huit poules de quatre, seize qualifiés, huitièmes de finale, quarts, demi et finale. On retrouve enfin la simplicité des années 54-70.
Deux chiffres à retenir pour finir : celui du pourcentage de pays qualifiés par rapport au nombre d’engagés : 100% en 1930, 50% en 1934, il baisse régulièrement jusqu’en 1978 (16%) avant de remonter momentanément dans les années 80 et de se stabiliser à 16% depuis 2006. Et celui du pourcentage de matches décisifs (à élimination directe) en phase finale : 0% en 1950, 5% en 74 et 78, mais 100% en 34 et 38. Il est désormais de 25%, comme dans les années 50-60.
Voici donc présentées de façon visuelle les différentes formules par année depuis 1930 :