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L’Afrique et la coupe du monde, une longue histoire

Présentes en coupe du monde depuis 1934, les sélections africaines n’ont jamais atteint les demi-finales de la compétition, seuls le Cameroun (en 1990) et le Sénégal (en 2002) s’en étant approchés. Pour autant, les coups d’éclat n’ont pas manqué, certains champions du monde s’en souviennent encore.

Depuis 1930, aucune sélection africaine n’a gagné de coupe du monde. Aucune n’a atteint la finale, aucune n’a joué de demi-finale. Cependant, deux joueurs nés en Afrique ont un titre de champion du monde : il s’agit des Français Marcel Desailly (né le 7 septembre 1968 à Accra au Ghana) et Patrick Vieira (né le 23 juin 1976 à Dakar, Sénégal). Ce dernier pourrait même être, s’il est retenu par Raymond Domenech en mai prochain, le seul champion du monde natif d’Afrique à participer à la première coupe du monde africaine.

L’histoire des sélections africaines en coupe du monde est pourtant intéressante à raconter. Elle commence en 1934 en Italie, avec l’Egypte. Affiliée à la FIFA en 1923, la sélection égyptienne joue un tour de barrage contre la Palestine et se qualifie pour la coupe du monde italienne. C’est la première sélection africaine en phase finale. Elle s’incline 4-2 face à la Hongrie en huitièmes de finale après avoir résisté une mi-temps.

En 1938 et 1950, il n’y a pas d’équipe africaine représentée, aucune ne s’étant inscrite. En 1954, l’Egypte tente à nouvau sa chance mais tombe sur un os en qualifications, contre l’Italie (1-2, 1-5). En 1958, pour la première fois les qualifications sont organisées en zones continentales. L’Afrique et l’Asie se disputent une place, et le Soudan élimine la Syrie mais déclare forfait. En 1962, la CAF (confédération africaine de football) créée cinq ans auparavant inscrit quatre équipes (Maroc, Tunisie, Ghana et Nigéria), le Maroc s’inclinant de justesse face à l’Espagne en barrages (0-1, 2-3). En 1966, l’unique place attribuée à l’Afrique, l’Asie et l’Océanie revient à la Corée du Nord.


Ce n’est donc qu’en 1970, pour la neuvième édition jouée au Mexique, que l’on va revoir une sélection africaine en phase finale, la FIFA ayant décidé d’attribuer une des seize places à l’Afrique. Il s’agit du Maroc, qui sort vainqueur d’une phase qualificative à laquelle participent dix nations. A Leon, les Marocains manquent de peu l’exploit contre le vice-champion du monde allemand, ouvrant le score en première mi-temps et ne s’inclinant qu’à dix minutes de la fin (1-2). La défaite contre le Pérou de Cubillas (0-3) condamne le Maroc qui accroche la Bulgarie avant de partir (1-1).

En 1974, l’Afrique noire s’invite en Allemagne avec le Zaïre, sorti largement vainqueur de qualifications auxquelles vingt nations africaines ont participé. Mais l’apprentissage sera rude, puisque les Zaïrois, battus d’entrée par l’Ecosse (0-2) vont prendre le bouillon contre la Yougoslavie (0-9) avant de s’incliner logiquement contre le tenant du titre brésilien (0-3). La Tunisie fera beaucoup mieux en Argentine quatre ans plus tard, et passera tout près de la qualification pour le second tour après une belle victoire sur le Mexique (3-1), la première d’une équipe africaine en phase finale. Une courte défaite contre la Pologne (0-1) lui laisse une chance de qualification contre les tenants du titre, l’Allemagne, qui s’en sort sans gloire par un petit 0-0.

Cet excellent résultat annonce en fait le coup de tonnerre de 1982. Cette année-là, l’Afrique obtient pour la première fois deux places dans une compétition qui s’élargit à 24 pays. Ce 16 juin à Gijon, l’Algérie mate l’Allemagne (2-1) au terme d’un match historique marqué par le talent de Belloumi, Madjer, Dahleb et Assad. La défaite contre une terne équipe d’Autriche (0-2) ne décourage pas les Algériens, qui l’emportent à nouveau contre le Chili (3-2). Deux victoires en trois matches, ce devrait être suffisant pour se qualifier. Mais un scandaleux arrangement entre l’Autriche et l’Allemagne lors du dernier match du groupe prive l’Algérie d’un second tour où elle aurait retrouvé... la France.

De son côté, le Cameroun se fait remarquer par sa solidité défensive impressionnante, avec un gardien de but exceptionnel, Thomas Nkono (capable d’arrêter d’une main un tir déclenché à cinq mètres par un attaquant adverse signalé hors-jeu). 0-0 contre le Pérou, 0-0 contre la Pologne, et 1-1 contre l’Italie, futur vainqueur, et au bord du KO pendant la dernière demi-heure, MBida ayant répondu instantanément au but de Graziani. L’Italie se qualifie avec trois nuls, comme le Cameroun, mais un nombre de buts marqués supérieur (2 contre 1).

L’Afrique noire est absente de l’édition 1986 où l’on retrouve l’Algérie et le Maroc. Les coéquipiers de Rabah Madjer jouent de malchance dans un groupe très relevé composé de l’Irlande du nord, de l’Espagne (vice-champion d’Europe) et du Brésil. Ils font pourtant mieux que se défendre en accrochant les Irlandais (1-1) et en tenant tête au grand Brésil pendant plus d’une heure (0-1). Le dernier match contre une belle équipe d’Espagne (0-3) les condamnera. Le Maroc, lui, va défier tous les pronostics en sortant en tête d’un groupe composé de l’Angleterre (0-0), de la Pologne (0-0) et du Portugal (3-1). Pour la première fois, une équipe africaine sort du premier tour. En huitièmes de finale, le Maroc de Bouderbala et Krimau affronte l’Allemagne à Monterrey et ne s’incline qu’à la 88e minute sur un but de Matthaüs.

En 1990, l’Afrique fait l’ouverture à Milan contre l’Argentine. Une grande première doublée d’une autre, puisque le Cameroun bat le tenant du titre, l’Argentine de Diego Maradona (1-0). Dans la foulée, le vétéran Roger Milla (38 ans) bat presque à lui tout seul la Roumanie (2-1) et qualifie les Lions indomptables qui laissent filer contre l’URSS (0-4). En huitièmes, contre la Colombie, il faut jouer les prolongations et c’est encore Milla qui maraboute l’adversaire par deux nouveaux buts (2-1). C’est donc l’accession aux quarts de finale, où les Camerounais vont largement dominer une équipe d’Angleterre qui aura besoin de deux pénalties pour arracher la prolongation et la victoire finale (3-2). Jamais une équipe africaine n’aura approché le dernier carré d’aussi près.
L’Egypte, de retour en Italie 56 ans après, tiendra tête aux Pays-Bas, champions d’Europe en titre (1-1) et à l’Eire (0-0), ne s’inclinant que face à l’Angleterre (0-1).

Aux Etats-Unis, l’Afrique obtient logiquement le droit d’aligner trois sélections. Le Maroc ne fait que passer (0-1 contre la Belgique, 1-2 contre l’Arabie Saoudite et les Pays-Bas) et le Cameroun dévisse brutalement après un nul correct contre la Suède (2-2) : les hommes d’Henri Michel s’inclinent face au Brésil (0-3) et s’effondrent contre la Russie (1-6), même si le seul buteur camerounais est Roger Milla, 42 ans au compteur ! C’est finalement le Nigéria qui sauve l’honneur en sortant d’un groupe difficile grâce à des victoires contre la Bulgarie (3-0) et la Grèce (2-0) qui compensent une défaite contre l’Argentine (1-2) où Maradona joue pour la dernière fois. En huitièmes à Boston, l’Italie est menée à la 25e (but d’Amunike), joue le dernier quart d’heure à dix, est éliminée jusqu’à deux minutes de la fin, arrache les prolongations, puis l’emporte grâce à un pénalty de Roberto Baggio (2-1).

L’édition française de 1998 accueille les trois mêmes équipes, renforcée de deux autres : avec l’élargissement à 32 pays, la coupe du monde réserve désormais cinq places à l’Afrique. LaTunisie est trop courte face à l’Angleterre (0-2), la Colombie (0-1) et la Roumanie (1-1) et l’Afrique du Sud tombe face à la France (0-3) avant de caler contre le Danemark (1-1) et l’Arabie Saoudite (2-2). Le Maroc croit à la qualification jusqu’à la dernière minute, mais sa victoire contre l’Ecosse (2-1) est insuffisante, la Norvège battant le Brésil sur le fil et raflant la deuxième place. Le Cameroun déçoit encore dans un groupe pourtant à sa portée où il ne gagne aucun match (1-1 contre l’Autriche, 0-3 contre l’Italie et 1-1 contre le Chili). C’est le Nigeria, encore une fois, qui décroche les huitièmes en battant l’Espagne (3-2) et la Bulgarie (1-0) avant de s’incliner contre le Paraguay (1-3). Ses largesses défensives feront le bonheur du Danemark, large vainqueur (4-1) au stade de France.

En 2002, c’est le Sénégal qui se retrouve dans la situation du Cameroun de 1990 en jouant le match d’ouverture contre le tenant du titre, la France. Score final, 1-0 pour les joueurs entraînés par Bruno Metsu, qui dans la foulée se qualifient en tenant tête au Danemark (1-1) et à l’Uruguay (3-3, après avoir mené 3-0 à la mi-temps). En huitièmes, les Lions de la Teranga sortent la Suède en prolongations (2-1) grâce à un doublé d’Henri Camara et retrouvent la Turquie pour un quart de finale tout à fait jouable. La déception est immense après la défaite (0-1 en prolongations) qui prive le public d’une demi-finale Sénégal-Brésil. Ce sera le meilleur résultat d’une forte délégation africaine dans laquelle ni l’Afrique du Sud (2-2 contre le Paraguay, 1-0 contre la Slovénie et 2-3 face à l’Espagne 2-3), ni la Tunisie (0-2 contre la Russie, 1-1 face à la Belgique et 0-2 contre le Japon), ni le Cameroun (1-1 contre l’Eire, 1-0 contre l’Arabie Saoudite et 0-2 contre l’Allemagne) ni le Nigéria (0-1 contre l’Argentine, 1-2 contre la Suède et 0-0 contre l’Angleterre) ne passeront le premier tour.

Ce ne sera pas mieux quatre ans plus tard en Allemagne, où la Tunisie échoue une nouvelle fois d’entrée (2-2 face à l’Arabie Saoudite, 1-3 face à l’Espagne et 0-1 contre l’Ukraine), comme les nouveaux venus togolais (1-2 contre la Corée du Sud, 0-2 contre la Suisse et la France) et angolais (0-1 contre le Portugal, 0-0 contre le Mexique et 1-1 face à l’Iran). La déception vient surtout de la Côte d’Ivoire de Drogba, il est vrai tombée dans un groupe infernal : 1-2 contre l’Argentine et les Pays-Bas, et 3-2 face à la Serbie. Le Ghana sauve l’honneur pour sa première participation, en sortant deuxième de son groupe derrière l’Italie (0-2) mais devant la République tchèque (2-0) et les Etats-Unis (2-1). La lourde défaite face au Brésil (0-3) en huitièmes ne traduit pas la réalité d’un match très équilibré.