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Le rude génie des Argentins

Vainqueurs de la France à Saint-Denis le 7 février, les Argentins ont démontré qu’ils restent l’une des trois ou quatre meilleures équipes du monde. Dans un numéro largement consacré aux Albiceleste, les Cahiers du football racontent comment l’Argentine aurait pu supplanter le Brésil à la fin des années cinquante.

On l’oublie souvent, mais le premier finaliste battu de l’histoire de la coupe du monde, c’est l’Argentine (contre l’Uruguay, en 1930). Et avant guerre, alors que les Italiens dominaient la scène européenne, les Argentins et les Uruguayens étaient probablement les meilleurs footballeurs du monde. C’est ce que raconte Salif T. Stacha dans le dernier numéro des CdF largement consacré aux Albiceleste. La légende argentine se nourrit de moments de gloire et d’autres plus honteux, parfois intimement mêlés, comme en juillet 66 à Londres, où le captaine Antonio Rattin est expulsé par un arbitre qui le comprenait pas, ou encore en juin 1978, avec la visite du dictateur Videla dans le vestiaire argentin après une victoire probablement achetée contre le Pérou (6-0). Et bien sûr, la fameuse « main de Dieu » de Maradona contre l’Angleterre en juin 86 à Mexico, suivie quelques minutes plus tard par un prodigieux slalom qui élimina la moitié de l’équipe adverse.

Mais le plus intéressant, c’est quand Salif T. Sacha raconte que l’Argentine aurait pu être championne du monde dès 1958. Probablement plus tôt, même, si l’Italie n’avait pas pillé ses meilleurs joueurs d’avant-guerre (Monti et Orsi) à une époque où il était possible de changer de sélection nationale. River Plate est sans doute le meilleur club du monde dans les années 40, et l’Argentine surclasse ses rivaux urugayens et brésiliens jusqu’en 1957. Quand elle retrouve la coupe du monde en 1958 en Suède, après 24 ans d’absence, l’Argentine est sûre d’elle. Un peu trop. Quelques mois avant le début de la compétition, l’Italie naturalise trois attaquants prometteurs et décapite la ligne d’attaque ciel et blanc. Résultat, une énorme claque au premier tour contre la Tchécoslovaquie (1-6) et la route dégagée pour les artistes français et brésiliens.

Car contrairement à son rival historique, l’Argentine a toujours eu du mal à confirmer son statut de favori en coupe du Monde : en 1982, champion en titre et renforcée par Maradona, elle semblait intouchable. Depuis 1994, donnée à chaque fois comme vainqueur potentiel, elle n’atteint pas les demi-finales. L’arrivée d’une nouvelle génération de surdoués (Messi, Tevez, Mascherano, Gago, Higuain, Agüero, dont un seul était titulaire à Saint-Denis) au sein d’une équipe redoutable dans la conservation du ballon, suffira-t-elle à inverser la tendance en 2010 ?