LOUISE : Le voilà enfin. Il est là. C’est quand même beau un livre, tu trouves pas, Giovanni ?
GIOVANNI : C’est sûr. C’est autre chose qu’un fichier texte de trois cent mille signes. On peut le toucher, le manipuler, l’ouvrir, il a un poids. Trois cents grammes à peu près. Tiens, c’est drôle, ça fait un gramme pour mille signes, c’est bien ça, madame l’instit ?
LOUISE : Bravo, l’Italien, tu as fait des progrès en calcul mental ! Et à cinq signes par mot, ça fait aussi un gramme pour deux cents mots. Pas bien lourd, au final. Heureusement que les livres ne se vendent pas au kilo, comme les patates.
FRED : Moi j’aime bien la couleur de la couverture. Un beau rouge pétant, le truc qui se voit bien sur la table d’un libraire. Ça a un petit côté camion de pompiers...
GIOVANNI : Ou drapeau de la révolution aussi.
FRED : Si tu veux, oui. Sinon, vous êtes prêts à rencontrer les lecteurs, vous ? Heureusement que tu n’as plus ta tignasse et ta barbe d’il y a vingt ans, on te prendrait pour un hipster aujourd’hui !
LOUISE : Arrête un peu, Fred, tu veux bien ? Lui, au moins, il les a toujours ses cheveux, même s’ils sont plus courts. Toi, tu as tout enlevé. Tu avais peur qu’on voit qu’ils sont devenus gris ?
FRED : Je fais ce que je veux de ma tête, d’abord. Je fais des économies de coiffeur et de peigne. Et tu ne trouves pas que je ressemble à Barthez comme ça maintenant ?
GIOVANNI : N’en fais pas trop, sinon je vais me sentir obligé de te coller un bisou sur le crâne, comme le faisait l’autre, là, comment il s’appelle déjà ? Celui qui s’est fait virer par les Qataris ?
LOUISE : Laurent Blanc. Question calcul, ça s’est amélioré, mais niveau mémoire des noms, ça ne veut pas rentrer.
FRED : Simon, vous en avez pensez quoi, du roman ? Je trouve ça plutôt fidèle, même si je passe pour le râleur de service, comme d’habitude...
GIOVANNI : Ah, pour ça, tu n’as pas changé, mon gars ! Et depuis six mois tu as parfaitement joué ton rôle. Il était temps qu’il sorte, ce bouquin, je n’en pouvais plus de t’entendre te plaindre.
LOUISE : Bon, ça suffit, les mecs, il y a des gens qui nous lisent, là, tenez-vous un peu mieux que ça ! Tiens, d’ailleurs vous pensez qu’on en aura combien, de lecteurs ?
GIOVANNI : Ben, tant qu’à faire, autant que de spectateurs au stade France, non ? Et après, on peut imaginer une adaptation en BD, un film...
FRED : Le voilà reparti dans son monde, celui-là. Non mais tu planes ! Quatre-vingt mille.... tu crois que j’ai envie qu’autant de monde que ça soit au courant de ce que je faisais le 12 juillet ?
LOUISE : N’oublie pas que tu n’es qu’un personnage de fiction, Fred, c’est pas toi qui décide. Je trouve aussi que Giovanni y va un peu fort, mais c’est un Italien, on va pas lui en vouloir. Allez, on se retrouve dans un an pour voir s’il avait raison ?