“A l’époque, on était animé par un idéal de liberté, alors
on s’est engagé. On avait fait des stocks d’armes
récupérés sur les Allemands, on s’en est servi pour
s’équiper.” Arthur Manouelian portait le matricule 41, son
ami Yvon Ollivier, le 37. Tous deux ont fait partie, après la
libération de Gardanne, du bataillon FFI de Provence, que
forme le chef d’escadron René Courson de la Villeneuve.
Le 7 septembre, cinquante Gardannais volontaires montent
à bord d’un camion de l’usine d’alumine en direction
de la caserne Miollis, à Aix. C’est ainsi que débute l’histoire
des commandos Courson.
Le 6 octobre, la période d’instruction d’un mois s’achève.
Les commandos quittent Aix et rejoignent en train Hautoison,
dans le Jura, où la première armée française du général
de Lattre est stoppée faute de ravitaillement. “De là,
continue Yvon Ollivier, on a formé un groupe à Cornimont
en renfort des commandos d’Afrique, qui se faisaient secouer
par les Allemands. Je me souviens qu’on dormait dans les
usines de fil DMC, on en avait
partout.” C’est là, le 25 octobre,
que tombent deux Gardannais,
Etienne Parisi et Fernand Pieratoni.
En novembre, c’est la
bataille de la Haute Alsace, et
la prise de Belfort après des combats
de rues très violents. Yvon
Ollivier et Arthur Manouelian
sont blessés.
“J’étais leur premier
soldat”
“A Valdois, se souvient Arthur
Manouelian, les gens étaient
cachés dans les caves. Quand ils
sont sortis, ils m’ont rencontré.
J’étais leur premier soldat, et
depuis on est reçu à bras
ouverts”. Après une période de
stagnation en hiver, la progression
reprend. A Cernay, encore des accrochages, des blessés
et des morts. “On était encerclé dans la forêt. On y est
allé, récemment, les trous d’obus se voyaient encore”. Colmar
est libéré le 2 février, l’Alsace redevient française le 7.
En mars, les commandos s’entraînent sur le Doubs. Ils préparent
en fait le passage du Rhin, qui se fera le 23 avril à
Neubrisach. “On a traversé le Rhin en barque, on était chez
eux, c’était nous les occupants. Drôle d’impression, quand
même”. “On a appris l’armistice le 8 mai au matin, c’était
9 ou 10h et on était au Tyrol. On s’est arrêté là.” Reste alors
à occuper le lac de Constance pendant quelques semaines,
puis c’est le retour à la vie civile pour les uns, comme Arthur
Manouelian, ou militaire, comme Yvon Ollivier, qui continuera
sa formation à Bordeaux, à Pau et à Montlouis, signera
pour partir en Indochine mais sera libéré après un mois
et demi de permission. “Je n’ai pas compris. Du coup, j’ai
arrêté l’armée”. Pour lui comme pour les autres, le libération
de l’Est de la France restera son plus grand souvenir.