De la tchatche et du blues énergies - huit juillet deux mille quatre - Bruno Colombari

, par Bruno

On se souviendra de ce Musiques à Gardanne 2004. Les Fabulous Trobadors et Michaël Jones ont largement justifié leur réputation au cours de deux soirées riches en émotion et en surprises.

Le quart de finale de l’Euro France-Grèce allait-il concurrencer la première soirée de Musiques à Gardanne ? On aurait pu le penser, vendredi 25 juin en début de soirée. Calme relatif sur le cours, avec quelques attroupements devant les groupes installés en bas de la rue Borély ou devant l’immeuble Bontemps. Sur le cours Forbin, l’atelier scratch du service jeunesse montre son savoir faire. Les terrasses des cafés sont plutôt bien garnies, et les écrans de télévision permettent de garder le contact avec Lisbonne, où les nouvelles sont plutôt inquiétantes. L’ambiance monte d’un cran avec les Gardannais de Hurle Vent qui assurent la première partie sur scène. Huit mois après Souad Massi à la Maison du Peuple, ils ont gagné un musicien supplémentaire (contrebasse) et étoffé leur répertoire, avec une texture sonore particulièrement chaleureuse.

A 23h10, pendant que les Bleus ruminent dans les vestiaires leur élimination sans gloire, Les Fabulous Trobadors s’apprêtent à justifier leur réputation. Claude Sicre et Ange B. sont accompagnés d’un bassiste, d’une batteuse, de deux choristes et de deux danseurs qui vont descendre à deux reprises au milieu du public pour entraîner la foule dans une ronde toulousaine où chacun se donne en spectacle à tour de rôle. En grande forme, les Occitans enchaînent avec deux autres spécialités maison : l’anniversaire sur scène de Florent, 23 ans, et Laurence, 30 ans (qui s’en souviendront) et les fameux duels de tchatche, éblouissante jonglerie verbale. Au bout d’un quart d’heure, l’élimination de la France est déjà oubliée. D’ailleurs, les coéquipiers de Zidane auraient pu s’inspirer des Fabulous Trobadors : maîtrise technique, changements de rythme incessants, percussion, accélérations foudroyantes, une-deux millimétrés, sens de l’esquive, créativité débordante, communion avec le public et par dessus tout une énorme envie de se faire plaisir. Tout ce qui a manqué aux Bleus sur la pelouse de Lisbonne était là, sur les planches de Gardanne, à portée de main, d’oreilles et de cœur.

Le ton est donné et le lendemain, le cours est pris d’assaut pour la deuxième soirée de ce qui s’avère déjà comme un grand cru de Musiques à Gardanne. Zic Zazou et son kiosque à musique itinérant entraîne le public de la place Dulcie-September à la place de la mairie, avant de conclure par un mini-feu d’artifice. Les Marseillais de Cinq avenues, un des quatre groupes lauréats du tremplin Courte Échelle, montrent déjà une belle maîtrise de la scène et séduisent avec leur rock français sincère et inventif. Arrive enfin Michaël Jones qui confie d’entrée : « je n’aurais jamais cru faire un jour un concert dans la ville que je traversais pour aller de Saint-Maximin à Plan de Campagne. Je suis content d’être là. » Et il le prouve en enchaînant blues et rock, français et anglais (son père, un Gallois, était du débarquement du 6 juin 1944 et a épousé une Normande), une chanson inédite écrite par Francis Cabrel (Marcher dans Memphis), une autre par Jean-Jacques Goldman (Le frère que j’ai choisi) et quelques reprises, notamment le Say it ain’t so de Murray Head. Son premier album solo est annoncé pour octobre.