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Bataille dans le ciel

CORPS À CORPS À MEXICO

Rendu célèbre lors du dernier festival de Cannes pour deux scènes de fellation, en ouverture et en clôture, Bataille dans le ciel mérite pourtant mieux que ça. C’est un film très épuré, au plus près des corps, presque entomologiste (on pense parfois à Greenaway) et pourtant fuyant en permanence le réalisme. C’est un film binaire qui alterne sans transition lumière et obscurité, douceur et violence, silhouettes fines et massives, vacarme et silence, extrême précision et flou total. Un grand télescopage à la mexicaine où richesse et pauvreté se côtoient et se mélangent parfois. On en sort sonné, un peu abasourdi, assurément dérouté.

Le jeu des acteurs est minimaliste, ils sont là, planté dans un décor qui bouge autour d’eux mais sans eux, dans cette grouillante Ciudad de Mexico dont on ne voit que des bribes, couloirs de métro, un protocole militaire, voies rapides saturées de véhicules ou quartiers résidentiels. Entre Marcos le chauffeur de général et Ana, fille privilégiée du même général, un jeu trouble et pervers se met en place dont on pressent qu’il finira mal. Carlos Reygadas embarque d’ailleurs le spectateur, par une utilisation très fine du son (ce qui semble ainsi être un dialogue de sourds entre les personnages dans une voiture n’est en fait qu’une conversation que la fille tient au portable avec son petit ami) et par de vastes panoramiques ondulants qui ferment le cadre en revenant au point de départ.

de Carlos Reygadas (Mexique) - sorti le 26 octobre - avec Brenda Angulo, David Bornstien, Marcos Hernández, Berta Ruiz, Anapola Mushkadiz