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Petra Magoni et Ferruccio Spinetti mettent la musique à nu

Vous avez aimé l’album Musica nuda ? Alors vous ne savez pas ce qui vous attend. Si vous avez une chance de voir la chanteuse Petra Magoni [1] et le contrebassiste Ferruccio Spinetti sur scène, dans une salle intimiste et belle comme celle du Cri du Port à Marseille, ne la laissez surtout pas passer [2]. Le duo italien - lui tout en retenue, elle exubérante, mutine, taquine, charmeuse, joueuse, bref, magnifique - peut y exprimer sans retenue ce qui fait sa force : une exceptionnelle conjugaison de deux talents, qui ne se laissent pas enfermer dans un quelconque académisme par leur savoir-faire, mais qui au contraire improvisent, jonglent, cherchent en permanence le contrepied, le déséquilibre, la prise de risque et le sens du jeu. Lui s’embarque dans des solos entre deux chansons, elle s’amuse à pincer les cordes de la contrebasse pour le déstabiliser, en vain bien entendu.

Le concert donne à entendre les morceaux les plus connus de leur premier album, comme Roxanne de Police, Eleanor Rigby des Beatles, Imagine de Lennon ou I will survive de Gaynor, mais aussi de nouvelles reprises que l’on retrouvera dans leur prochain album (annoncé pour février 2006) : Like a virgin de Madonna, deux chansons en français, La vie en noir de Nougaro et Couleur café de Gainsbourg, et une somptueuse adaptation en italien de Ne me quitte pas de Brel. Sur scène, le travail de Ferruccio Spinetti est impressionnant, plus encore que dans l’album où la voix de Petra emporte tout sur son passage. De sa contrebasse, il tire tous les sons qu’il veut, il la frappe, il la caresse, il imite même les vocalises de Petra dans une surenchère complice et joyeuse. A la fin du concert, il tient tout de même à préciser qu’il ne forme avec Petra qu’un couple d’artistes, que chacun vit de son côté, et qu’elle est mariée, a deux enfants auxquels il « n’a pas contribué », selon ses propres mots.

Et quand tout est terminé, Petra et Ferruccio descendent à l’accueil pour discuter avec leur public, échangeant quelques mots en italien, sur les concerts en France, leur album qui se vend bien chez nous, la température qui baisse et la nécessité de porter une écharpe pour ne pas prendre froid. Tout près de ce duo qui me rappelle tant Giovanni et Nat, dans mon roman 12 juillet, je tente d’attraper quelques mots au passage tout en regrettant amèrement de ne pas avoir fait italien au collège. Allez, tais-toi, regarde et écoute pendant qu’il est encore temps.

[1Après avoir écouté son album en boucle, j’avais écrit un texte sur l’effet que fait sa voix. Je n’en changerai pas un mot après l’avoir vue en concert

[2Pour vous donner une idée, voir la vidéo d’un enregistrement en studio sur le site italien de Kataweb.