<media1636|embed|right|class=shadow>D’abord, puisqu’après tout on est dans un film de genre (biopic kung fu, pour faire vite), il y a les (nombreuses) scènes de combat. D’habitude, ces morceaux de bravoure, dont on apprend que certains ont nécessitė un mois entier de tournage, me laissent indifférent au mieux, plein d’ennui au pire. Là, Wong Kar Wai les filme comme une chorégraphie stylisée à l’extrême, dilatant et contractant tour à tour et simultanėment le temps et l’espace, ce qui est après tout le propre du cinéma.
C’est aussi au cinéma qu’on pense immédiatement en entendant la définition du kung fu : « horizontal, vertical », soit rien d’autre en fait que les deux dimensions (deux, pas trois !) d’une image projetée sur un écran. Et la technique de mise en scène de Wong Kar Wai, tout en vitesse d’exécution puis en temps arrêtė, est une belle métaphore du montage.
On retrouve également du Sergio Leone dans ces plans cadrés serrés de visages généralement peu expressifs ou ces images en macro de gouttes d’eau et de traces dans la neige, comme si le cinéaste cherchait une vérité au cœur-même de la matière. En revanche, la musique surligne un peu lourdement l’action, alors que les bruitages sont parfaits, et que l’on aurait aimé plus de passages silencieux qui auraient donné encore plus de force à l’image.
Tant de précision, de maîtrise et de splendeur visuelle ne rend pas l’histoire très accessible, contrairement à La porte du paradis de Michael Cimino. Le scénario est complexe, l’arrière-plan historique, pourtant très riche (la Chine des années trente aux années cinquante), est à peine esquissé et les personnages, notamment les deux maîtres incarnés par Tony Leung et Zhang Ziyi peinent à émouvoir, enfermés dans la perfection de leur talent et un code d’honneur complètement figé dans le marbre.
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Wong Kar Wai introduit pourtant dans la biographie de Ip Man un élément romancé totalement improbable dans la Chine du milieu du siècle dernier : le personnage féminin de Gong Er, qui s’oppose frontalement à la tradition et décide de venger son père tué par son propre disciple, Ma San. Ce sera l’occasion d’une mémorable scène de combat sous la neige dans une gare, où un train au départ découpe l’arrière-plan à la manière d’une pellicule de film.