Difficile de comprendre, à la sortie de la projection de Hugo Cabret, ce que Martin Scorsese a voulu faire avec ce film : rendre hommage au cinéma primitif de Georges Méliès, touche-à-tout de génie, se lancer dans une ambitieuse reconstitution historique du Paris de 1930, s’essayer au genre dit de Noël, tourner avec des enfants, ou bien encore filer une (très belle) métaphore sur le mécanisme du temps et de la mémoire, le premier incarné dans d’incroyables systèmes d’horlogerie et le second représenté par le cinématographe, succession d’images fixes redonnant vie aux amours mortes ?
Hugo Cabret, c’est un peu tout ça à la fois, un bric-à-brac adapté du roman dessiné de Brian Selznick et qui donne un résultat aussi bancal que la jambe artificielle du chef de gare de Montparnasse, avec son mécanisme qui se bloque par moments. Desservi par une version française franchement mauvaise, le film souffre aussi d’un scénario bien faible et des personnages parfois au-delà de la caricature.
Et pourtant, par instants la magie fonctionne, un peu comme dans Les Frères Grimm de Terry Gilliam : les magnifiques horloges de la gare Montparnasse, la reconstitution spectaculaire du célèbre accident ferroviaire de 1895 (l’année de la naissance du cinéma), les tournages déjantés dans le studio vitré de Méliès, le même sur scène présentant au public ses films qu’il croyait perdus...
A ces moments-là, on imagine le film sous-jacent dans le projet de Scorsese : un pur hommage au cinéma, un grand coup de chapeau à Méliès dont le talent, immense, fut un temps noyé dans une carrière malheureuse et brisée. Il y avait là largement de quoi faire un très grand film, mais il n’est pas certain qu’il aurait été réussi. Hugo Cabret est là, avec ses imperfections et ses maladresses, et c’est déjà pas si mal.
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