télécharger l'article au format PDF

Musica nuda, live à Paris en DVD

Leurs deux albums ont trouvé leur public en France. C’est donc à l’occasion de leur tournée hivernale que leur éditeur, Bonsaï Music, a capté un concert à Bagneux pour en faire un DVD. Un remarquable documentaire de 26 minutes permet par ailleurs de faire connaissance avec le duo de choc Petra Magoni - Ferruccio Spinetti.

Le plus intéressant dans le DVD que Bonsaï Music a sorti au début de l’été [1], c’est le documentaire Petra & Ferruccio qui montre en 26 minutes la complicité du contrebassiste et de la vocaliste. Comment ils se sont rencontrés, pourquoi ils privilégient l’improvisation, comment ils vivent leurs tournées... Entrecoupés d’interviews, le film offre aussi quelques chansons captées au vol, un Roxane place des Vosges à Paris, un sublime Sacrifice sur un canapé rouge posé au milieu de la campagne toscane, un Io sono metà dans le vent glacé d’une plage de Dunkerque [2]. Petra et Ferruccio s’en donnent à cœur joie, comme des gamins frondeurs et talentueux qui n’en font qu’à leur tête.

On les voit aussi lors de la fête de la musique, à Paris, faire semblant de téléphoner à Paul McCartney et à Ringo Starr, préparer de grandes assiettes de spaghetti ou jouer du piano comme Glen Gould (à peu près). Petra est toujours aussi mutine, aussi câline, aussi féline, bref, aussi divine. Quant à Ferruccio, son flegme imperturbable cache mal un talent monstrueux. Il parle de sa contrebasse comme une compagne, avec laquelle il a parfois « une relation amoureuse », même si parfois il arrive qu’il « la maltraite », selon son humeur. Une compagne encombrante, surtout dans les voyages, quand il faut réserver une place en wagon-lit rien que pour elle...

Ce qui saute aux yeux, c’est à quel point l’addition de leurs talents respectifs donne quelque chose d’unique, une alchimie mystérieuse qu’eux-mêmes ne cherchent pas particulièrement à comprendre. On dirait parfois deux joueurs de foot qui se connaissent par cœur et qui se trouvent les yeux fermés, d’instinct, l’un s’adaptant au quart de tour aux fantaisies de l’autre. Beaucoup plus Zidane que Materazzi, évidemment.

Le concert de mars 2006, capté au théâtre de Bagneux, permettra à ceux qui n’ont pas vu le duo sur scène de les découvrir. Même si Petra met du temps à se libérer complètement (elle avait semblé plus détendue en novembre dernier au Cri du port, à Marseille), la réalisation élégante d’Emmanuel Grancher nous offre une heure et demie très agréable, au plus près de la contrebasse de Ferruccio et du micro de Petra. Juste avant le dernier morceau (Imagine), la chanteuse et l’instrument à cordes se lancent ainsi dans une surenchère sonore qui s’achève dans une cacophonie de sirènes de pompiers. Puis, sans la moindre transition, Petra enchaîne avec les premiers mots de l’ultime tube de Lennon, et nous voilà repartis pour un tour. Le dernier.

[1A écouter aussi, une interview intéressante d’Eduardo Olivares sur Télérama radio, dans lequel le duo revient sur le choix de ses reprises, des standards de la chanson italienne des années soixante aux titres des Beatles, ainsi que la façon dont ils se servent des concerts pour trouver de nouvelles idées.

[2c’est à cette occasion qu’a été prise la photo de la jaquette du CD Musica nuda 2