De la même façon qu’un astronome peut passer une vie à étudier les trous noirs, John Costello consacre son existence à cataloguer les meurtres des tueurs en série. Documentariste au City Herald de New York, ce personnage kafkaïen à la vie tirée au cordeau est lui-même rescapé d’un meurtrier qui se prétendait être le Marteau de Dieu. Quand l’inspecteur Ray Irving se lance sur les traces d’un nouveau serial killer qui semble reconstituer de crimes du passé, John Costello va lui venir en aide...
<media1696|insert|right|class=shadow>Ellory, on s’en doute, a passé un temps considérable à se replonger dans les parcours macabres des plus grands tueurs en série des Etats-Unis, un pays qui n’en manque pas et qui en produit régulièrement de nouveaux chaque année, comme le montre l’actualité récente. On évoque ainsi John Wayne Gacy, le Zodiaque, Arthur Shawcross ou Kenneth McDuff.
Mais Ellory n’est pas le seul à s’y intéresser. Il y a aux USA un véritable marché parallèle des photos, pièces à convictions, armes, vêtements dérobés dans les archives de la police et revendues clandestinement dans des sortes de vide-greniers macabres. Et enfin, il y a des groupes de recherches menées par des rescapés de tueurs en série, des archivistes du mal qui consacrent leur vie à éplucher celle de leurs bourreaux. Comme John Costello.
The anniversary man, le titre original du roman d’Ellory, est plus précis et plus explicite que celui choisi par Sonatine, Assassins. D’anniversaires, il en est question tout au long du récit, anniversaires macabres puisque l’idée du tueur contemporain est de coller au plus près des meurtres historiques, avec une mise en scène scrupuleuse dont la seule inconnue, finalement, réside dans l’identité des victimes puisqu’elles sont choisies au hasard. Et bien sûr, l’identité du tueur, que l’on ne voit jamais mais dont la présence est obsédante, au point de pousser dans ses retranchements l’inspecteur Irving qui se retrouve face à un casse-tête impossible à résoudre, dans lequel il a toujours plusieurs coups de retard.
C’est bien sûr tout l’art d’Ellory de multiplier les fausses pistes pour créer chez le lecteur une impression grandissante de trouble, de perplexité et de perte de repères. Tout ce qu’on croyait acquis est remis en cause, tout ce qui paraissait impossible devient probable, tout est masques et jeu de dupes. Le vertige qui s’empare de l’inspecteur Irving devient contagieux, car bien sûr, comme son tueur en série, l’auteur a plusieurs coups d’avance sur son lecteur. C’est l’évidence, mais le résultat est un tour de force narratif. On en redemande.