Sorti à l’automne 1997, De beaux lendemains est depuis cette date à la tête de mon panthéon cinéphilique. Adaptation par Atom Egoyan du roman de Russell Banks, Sweet Hereafter est un film inclassable, hors normes, qui plonge ses racines dans les mythes (la légende du joueur de flûte) et qui parcourt dans un frémissement continu les gouffres que sont la filiation, l’inceste et la perte.
Alors qu’il avait démontré, dans le somptueux Exotica (1997), qu’il savait allier sens de l’image et sens du récit, il touche avec De beaux lendemains à l’épure, grattant jusqu’à l’os le roman, l’adaptant au sens noble, en le transformant tout en respectant fondamentalement son esprit.
Le film s’ouvre par un lent panoramique sur un couple endormi encadrant un enfant. On retrouvera plusieurs fois ce mouvement de caméra, mais vertical cette fois, partant du sol, montant jusqu’au ciel pour revenir au sol, dans une autre strate du récit.
Car la particularité de De beaux lendemains, c’est sa construction en cercles concentriques, le centre du récit étant l’accident du bus scolaire englouti dans un lac gelé. Egoyan avouera lui-même avoir dénombré pas moins de 32 strates temporelles dans le film, éclatées comme un puzzle. C’est un point commun essentiel avec le roman de Paul Auster, Leviathan, articulé lui aussi autour d’une chute.