Un art sonore, le cinéma

de Michel Chion - éditions Cahiers du cinéma

Si l’image, au cinéma, est ce que contient le cadre de l’écran, le son est bien plus vaste. Il englobe la musique, le bruitage et bien entendu les dialogues, dans un savant mélange qui stimule l’imaginaire du spectateur et qui lui permet d’aller au-delà de ce qu’il voit. En passeur éclairé, Michel Chion nous explique tout ça.

Cet homme-là sait tout faire, ou presque. Journaliste, écrivain, réalisateur, compositeur, Michel Chion est surtout un extraordinaire pédagogue, un formidable transmetteur de connaissances. Avec lui, on joue avec les mots, au besoin on en invente (acousmate, audio-divisuel, décoffrage temporel, écoute emboîtée, fantôme sensoriel, synchrèse, téléphème...).

Mais attention, il ne s’agit pas d’enliser le lecteur dans un jargon parfaitement hermétique. Michel Chion explique, illustre, démontre, et prend soin à la fin de l’ouvrage d’écrire 28 pages de glossaire pour définir méticuleusement chaque terme technique.

Un art sonore, le cinéma est donc une histoire du son dans le septième art. Ce qui englobe bien entendu la période dite du cinéma muet (1895-1928), que Chion préfère d’ailleurs appeler « cinéma sourd ». Toute la première partie de l’ouvrage est bâtie chronologiquement, jusqu’à l’époque contemporaine née avec le Dolby (1975) et le numérique (1990).

Loin d’être pédant, l’auteur se permet des titres mystérieux ou poétiques (Combien de temps faut-il au temps pour qu’il durcisse ? Dieu est un disc-jockey, Comme des larmes dans la pluie) qui font de la lecture de ces 400 pages un bonheur de tous les instants. De très nombreux films sont cités en exemple, et dans ces films des scènes, et dans ces scènes parfois justes quelques plans, en un saisissant effet de zoom narratif.

En bonus, comme on pourrait le dire pour une édition DVD, Michel Chion offre une analyse poussée d’une scène des Oiseaux, de Hitchcock, des Lumières de la ville de Chaplin, de l’Atalante de Vigo, d’Un condamné à mort s’est échappé de Bresson. Et là, on retrouve le style précis, vivant et pédagogue du livre consacré à l’œuvre de Stanley Kubrick (L’humain, ni plus ni moins).

Désormais, on ne regardera plus un film comme avant. On l’écoutera aussi.